A entendre Elyès Fakhfakh évoquer, constater et analyser le contexte général de l’économie tunisienne, la décroissance financière et les contraintes socioéconomiques, l’on se demande si le pays n’est pas déjà dans le mur ! On pourrait comprendre les mises en garde du Chef du gouvernement, ses appréhensions, ses doutes et ses craintes. Voire son angoisse et son anxiété. Sa fierté et « celle de tous les Tunisiens » d’avoir vaincu la pandémie. Les constats et les interrogations ne s’arrêtent pas là pour autant. Il reste à se demander comment les affaires de la Tunisie peuvent-elles se développer alors que la situation est au plus mal !
Tenir aujourd’hui une comptabilité sur les dérives engendrées ces dernières années par l’indisposition de remettre le pays en ordre de marche, les manquements et les erreurs avérées, ce qui aurait pu être accompli, ce qui risque encore de compromettre l’avenir, relève d’un exercice de haute voltige. De façon générale, les différents acteurs politiques n’ont cessé de dégager et de produire un environnement qui est loin de répondre aux véritables exigences du pays.
Il faut dire qu’il y a matière à discussion sur tout ce qui a été évoqué dans l’entretien accordé par un chef de gouvernement qui fait face à un paysage et une atmosphère politiques instables, où on ne voit pas comment on peut évoluer sans se diviser. La contrainte de la relance et de la construction oubliée, l’on ne cesse de miser sur une conjonction immédiate de facteurs peu favorables avec des recettes fiscales plus que jamais défaillantes et un endettement extérieur à hauteur de 60%. Hypothéquée à l’étranger avec une cotation des plus faibles, la Tunisie n’a aujourd’hui d’autre choix que de compter sur ses propres ressources. L’argent ne peut pas, ne doit pas servir seulement à la consommation, il doit alimenter l’économie et favoriser l’investissement. C’est à tous les niveaux qu’il faudrait aujourd’hui craindre le pire, mais aussi et surtout les défaillances et les manquements qui peuvent surgir à tout moment. Là est sans doute le danger actuel qui guette l’avenir de la Tunisie, à travers notamment le comportement abusif de ceux qui sont pourtant censés veiller à sa bonne marche !
La politique socioéconomique est de plus en plus entraînée dans une spirale à multiples facettes : procédurale, morale, éthique, humaine. Sa valorisation est si pauvre qu’elle ne cesse d’afficher une impuissance certaine, notamment au niveau de la relance et de la construction. Dans les différentes considérations, individuelles ou collectives, il n’est plus question, ou presque, d’intérêt commun. Il y a comme un mélange d’incomplet et d’imparfait.
Ralenties dans leur mode de performance, l’économie et les finances de la Tunisie ont longtemps fait un mauvais usage des notions de rebondissement et de renaissance. Et si on tient à parler de quelques éclaircies dans la grisaille, l’on ne doit pas oublier qu’il y a des rebondissements qui ne sont qu’une parenthèse dans les différents parcours.
Le Chef du gouvernement s’attaque aujourd’hui aux insignifiances et aux dérives qui ne sont plus, selon lui, une affaire marginale. Il y a de plus en plus cette tendance à oublier les bases et les fondamentaux sur lesquels doit reposer le pays. La confiance avec les autres parties prenantes est certes encore fragile. Mais Elyès Fakhfakh affirme y travailler. « J’ai l’opportunité de servir les Tunisiens et j’y œuvrerai jusqu’au bout. Que l’on se mette d’accord, ce serait tant mieux, autrement je n’ai pas d’autres alternatives… ».